AUTHENTIQUE
KAMO commence le graffiti en 1995. Issu de la culture urbaine aux influences hiphop, il est fasciné par le dessin et la destructuration de lettres. Entre les squats, les murs d’expressions, terrains vagues et cahiers de dessin, il considère la ville et l’actualité comme une véritable source d’inspiration. Son travail évolue et s’oriente vers l’illustration délaissant le lettrage au profit de personnages ou objets ayant un lien avec son histoire.
A travers ses illustrations, il cherche à transmettre la même énergie que dans les lettrages. Aérosol, acrylique, huile, mine, encre, pastel … A travers ces différentes techniques il tente d’attribuer à ses peintures une force expressive, dynamique et agressive pour passer du mur au papier et du papier à la toile. L’objectif principal est de rester AUTHENTIQUE et en phase avec la culture d’origine de l’art urbain en le détournant.
©photo-Valérie Delplanque & KAMO à la galerie Audet, Colmar
Sortir de la nuit : entretien avec Kamo, artiste et graffeur
Kamo se définit non comme artiste mais graffeur et révolutionnaire. Ce qui le motive renvoie à la violence dans lequel le monde se noie. Pour lui, le vrai graffeur crée des actes militants porteurs de messages politiques au sens très large du terme. Longtemps Kamo a privilégié la production et la quantité à la qualité. Mais peu à peu l’artiste (et après 5 ans de réflexion) devient un peintre. Il accepte d’exposer en galerie moins pour satisfaire son ego que pour venir à bout de la frustration qu’il éprouvait face à des artistes sortis de l’ENSBA ou d’ailleurs et qui s’emparent des codes du graffiti sans en accepter et comprendre l’esprit, le sens, la portée. Face à ceux qui jouent de l’esthétisme de l’urbain, l’artiste a accepté de franchir ce cap pour montrer la vérité d’une pratique suburbaine.
Kamo y baigne depuis 1995. Peu à peu, il a gagné en conviction. Il sait que les « vandales » du monde moderne ont plus de légitimité que ceux qui se servent d’une esthétique sans en accepter le jeu. Lui, à l’inverse, l’accepte. Collective au départ, son ambition ne se réduit pas au fil du temps à la peau de chagrin de l’ego. A titre d’exemple, il partage ses prochaines affiches avec un autre graffleur (Flo) et le photographe Guillaume S Plisson. D’où ce nouveau « pas du pas » afin de donner la part qui lui revient à la culture militante suburbaine. Ce nouvel « écart » permet au créateur de ne plus avoir à se battre contre les moulins à vent des diverses juridictions de caciques.
Entretien :
Qu’est-ce qui vous fait lever le matin ?
Pouvoir honorer mon rôle le père dans le souci de construire le futur.
Que sont devenus vos rêves d’enfant ?
Je n’en ai jamais eu sinon l’univers de la glisse. J’ai réussi à y accéder : je suis donc allé au bout d’un de ces rêves.
A quoi avez-vous renoncé ?
La vie est faite de sacrifices. Il faut savoir les oser.
D’où venez – vous ?
D’une famille modeste mais je n’ai manqué de rien hormis l’amour qui m’a rapproché de l’univers de la rue (skate, graffiti).
Qu’avez-vous reçu en dot ?
La richesse de l’échange. Elle le reste au quotidien.
Où et comment travaillez-vous ?
Le jour et la nuit. Et de manière un peu schizophrénique. L’identité nocturne du graffeur doit demeurer cachée.
Un petit plaisir — quotidien ou non ?
Le plaisir des moments avec mes enfants et ceux de solitude sur la route (pour mon travail) afin de réfléchir et me remettre en question.
Qu’est-ce qui vous distingue des autres graffeurs ?
On a tous quelque chose à revendiquer. Chacun son style, son univers.
Et votre première lecture ?
Des magazines sur les cultures suburbaines ou le sport.
Quelles musiques écoutez-vous ?
Le rap français dans lequel il y a un réel contenu.
Quel film vous fait pleurer ?
Tous les films avec de l’émotion.
Quand vous vous regardez dans un miroir qui voyez-vous ?
Moi.
Quel(le) ville ou lieu a pour vous valeur de mythe ?
New York, Paris (pour le graffiti), La Nouvelle Zélande, la Californie (pour la glisse).
Quels sont les artistes et écrivains dont vous vous sentez le plus proche ?
Ceux qui sont authentiques, engagés, déterminés. Bons ou mauvais qu’importe. Qui est-on pour juger ? Il y a des poètes partout, chacun à sa part de créativité pour peu qu’elle ne soit pas assassinée.